Comment les câbles sous-marins, véritables serpents de mer du web mondial, amènent Internet jusqu’à nous

Le trafic Internet transite à 99% par ces câbles, pas plus gros que tuyaux d’arrosage, devenus des infrastructures-clés dans le fonctionnement mondial.

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Radio France

Publié le 03/01/2024 15:03

Temps de lecture : 2 min

Des câbles sous-marins. (ASN)

Direction les profondeurs des océans ! Car ce n’est pas grâce aux satellites que vous pouvez regarder cette vidéo de chat trop mignonne sur Instagram, ou bien écouter votre radio préférée en direct sur l’application Radio France. En réalité, tout ça se passe essentiellement sous l’eau : 99% du trafic Internet se fait grâce à des câbles sous-marins pas plus larges que de gros tuyaux d’arrosage, qui reposent parfois à plus de dix kilomètres de profondeur.

Au total, ils sont près de 500 câbles à parcourir le globe, avec deux autoroutes principales, sous l’Atlantique entre l’Europe et l’Armérique du Nord, et sous le Pacifique Nord, entre l’Asie du Sud-Est et les USA. Leur carte est d’ailleurs publique et est disponible sur Submarine Cable Map en format interactif [en anglais].

La carte des câbles sous-marins dans le monde, dans TeleGeography. (SUBMARINE CABLE MAP / TELEGEOGRAPHY) La carte des câbles sous-marins dans le monde, dans TeleGeography. (SUBMARINE CABLE MAP / TELEGEOGRAPHY)

« L’information qui passe à un instant T par un câble est multiple, détaille Camille Morel, chercheuse en relations internationales à l’université Lyon 3, et qui a consacré un ouvrage au sujet. Vous allez avoir du flux réseau social, vous et moi on va utiliser Internet et on va avoir nos données qui vont passer par ces câbles, il va y avoir aussi de l’administration. Dans une certaine mesure, il y a des flux financiers, de banques. Il peut y avoir aussi des flux militaires, même si évidemment les données seront chiffrées. »

« Il n’y a aucun autre moyen aussi fiable pour faire transiter autant de données aussi rapidement. »

Camille Morel, chercheuse en relations internationales

à franceinfo

Flux financiers, militaires, conversations privées… Tout ça est très convoité, et donc très surveillé. De nombreux États, dont la France, renforcent depuis quelques années leurs moyens pour protéger ces câbles, qui appartiennent pour l’immense majorité à des conglomérats d’acteurs privés.

Le premier risque, c’est évidemment l’interception de ces données. Mais en pleine mer, cela relève surtout du fantasme, explique Camille Morel, car c’est techniquement compliqué voire impossible. L’espionnage se fait en réalité surtout à terre, au moment où ces câbles se connectent au réseau de fibre souterrain. Ces infrastructures de connexion, dont les lieux exacts sont secrets, sont donc particulièrement sensibles. Edward Snowden était le premier à révéler en 2014 que la NSA récupérait massivement des données à ce moment-là. Mais ils ne sont pas les seuls. Un ancien de la DGSE confirmait à France 24 que la France aussi surveille de manière très précise les câbles, depuis 2007-2008. « C’est légal mais c’est secret », précise-t-il.

Et puis l’autre risque, c’est bien sûr la destruction de ces câbles par des puissances ennemies. Une stratégie aussi vieille que la guerre puisqu’il s’agit de priver l’adversaire de ses capacités de communication. Ainsi, dès la Première guerre mondiale, les câbles télégraphiques sous-marins, ancêtres des câbles de fibre optique, avait déjà été pris pour cible.

« Récemment, on n’a pas d’exemples concrets de coupure de câble revendiquée par un État ou par un acteur, mais on a des suspicions. »

Camille Morel, chercheuse en relations internationales

à franceinfo

« Par exemple, on a des suspicions régulières autour des navires russes à proximité des câbles, même si on n’a jamais corrélé avec une coupure formelle de câbles sous-marins », détaille Camille Morel. Les endommagements sont toutefois courants, une centaine par an environ. La plupart sont dues aux activités marines, et notamment à la pêche. Les filets qui traînent au fond de l’océan ou bien les ancres qui tombent au fond de l’eau sectionnent ou abîment régulièrement les câbles. Les catastrophes climatiques peuvent aussi jouer un rôle. Ainsi, début 2022, le cable qui relie les îles Tonga au monde avait été coupé par une éruption volcanique sous-marine, privant le pays d’Internet pendant près d’un mois. 

Mais la situation des Tonga est très loin de celle de la France. L’hexagone est relié par de multiples câbles, et si les territoires ultramarins sont moins reliés, la plupart ont au moins deux câbles qui arrivent sur leur territoire. Alors pas d’inquiétude, si l’un des câbles est endommagé, votre vidéo Instagram empruntera un autre tuyau pour vous parvenir.

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